09/03/2021
Tarzanides n° 487
Loft-Story
Loana ? Loana ? d'où donc ai-je retenu ce prénom féminin pas du tout familier à ma scolarité ? Mes petites copines répondaient présentes à Nicole, Bernadette ou encore Mireille. Mais peut-être que qu'avec vous une Loana jouait à cache-cache, le jeu qui évolue jusqu'à jouer au docteur ? D'autant qu'aujourd'hui ce prénom évoque tout un collectif de jeunes gens jouant des pieds et des mains dans une piscine javellisée espionnée par des caméras : Alors comme ça on raconte que votre Loana a oublié son dentier dans des toilettes où elle avalait des pilules bourrées d'un tranquillisant ?
L'autre Loana, ma mienne de Loana, c'est celle présente sous forme d'une BD dans un journal hebdomadaire de grand format ne comptant que quatre pages : « Les aventures de Paris-jeunes » dont le numéro 1 fut commercialisé le 30 mai 1945. les récits en images n'étaient pas captivants, leurs dessins encore moins. Heureusement, par la suite, l'éditeur revint aux séries américaines qui avaient déjà fait son succès à la fin des années 1930. Ainsi le Fantôme du Bengale, Raoul et Gaston, Lone Ranger, etc.
Toutefois, Loana ne fit son apparition qu'avec le numéro 126 du 8 novembre 1948. Le graphisme était signé de Carlo Marc, lequel exhibait une jolie fille non dénuée d'érotisme, à peine vêtue d'une mini-jupe ornée de fleurs sauvages. Elle affrontait dans la jungle de Bornéo les envahisseurs militaires japonais dirigés par Tojo surnommé Lame de rasoir. Scénario alors assez fréquent dans nos bandes dessinées au sortir de la fin de la Seconde Guerre Mondiale. Par exemple : Buck Danny dans Spirou, ou encore Sergent Garry des Éditions Artima.
Auprès des gamins le charme de Loana opéra. Sans doute même les responsables du journal « Les aventures de Paris-jeunes » imaginèrent-ils en modifier le titre pour le remplacer par le prénom de l'héroïne en tenue légère. C'est ce que permet de supposer le numéro 4 de 1949 où le visage rayonnant de Loana apparaît centré en dessous de l'en-tête d'une nouvelle série.
Comme toute ses rivales (" Les filles de la jungle " également présentes dans le cinéma des années 40 et 50) Loana devait disparaître mise à mort par la Loi de 1949. Son créateur Carlo Marc essaya bien de la prolonger en la rendant pudique, pantalon long et corsage boutonné jusqu'au cou. Cependant rien ne la sauva d'une censure qui durant plus de dix ans obligea à rendre invisibles toutes les jolies filles dans les illustrés destinés aux garçons.
Image Loana condamnée au bleu de travail : prolétarienne de service sous le contrôle de Maurice Thorez et du Chanoine Kir.
Doc Jivaro
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07/03/2021
Tarzanides n° 486
Cachez ce sein ...
En avril 1967 et sous la direction de Claude Moniterni, fut édité le catalogue relatif à la grande exposition BANDE DESSINÉE ET FIGURATION NARRATIVE qui ouvrait dans le Musée des Arts Décoratifs, rue de Rivoli, Paris-Ier.
Les auteurs ne manquèrent pas de dénoncer sur deux pages (138 et 139) les ravages que la censure votée en Juillet 1949 infligeaient à nombre d'images BD éditées en France. A titre d'exemple voici la Princesse N'ani, créée par Brun Hogarth mais mutilée par les partenaires occasionnels catholiques et communistes retardant le plus possible l'émancipation sexuelle de notre enfance.
Le catalogue étant imprimé en noir et blanc, ses responsables ne nous donnèrent pas à voir une autre image, celle-ci en couleur et témoignant de la férocité des censeurs. La voici ci-dessous extraite du numéro 528 de Spirou, année 1948.
On ne devrait pas avoir à rappeler que les vertus de pudeur, de décence, etc. proviennent de barbares tortures, mutilations, etc. et que nos lointains ancêtres apprirent à cacher leurs organes sexuels afin de les présenter le moins possible comme objets de convoitise devant leurs agresseurs. En fait et pour en revenir à cette simple image, ce n'est peut-être pas la poitrine de la jolie N'Ani que les tortionnaires auraient dû supprimer mais l'avant bras au premier plan du dessin : ne croirait on pas qu'il fait symboliquement allusion à un pénis énorme, celui de TARZAN ?
Burnes Hogarth n'était pas Michel Ange ! contrairement à ce qu'affirment ceux et celles qui abusent de compliments en sa faveur : non seulement il est étourdi en mélangeant les jambes de la femme et les pattes du lion (une patte arrière du fauve apparaît comme jambe de la pin-up) mais encore et surtout sa pratique fantaisiste de la myologie ne peut en rien convaincre celui qui a lu et relu le Traité d'Anatomie Artistique de Paul Richer (1890).
Doc Jivaro avait préparé un sujet tout autre que celui-ci qu'il vient d'improviser. Il faudra bien qu'un jour prochain il argumente pour se justifier de parfois choisir la manière naïve mais finalement robuste de Rex Maxon plutôt que le style kitsch Art Floral maniéré signé de l'esbroufeur Burnes Hogarth.
Doc Jivaro
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27/02/2021
Tarzanides n° 485
T'as le bonjour d'Alfred !
Expression verbale "à la française" devenue quasi proverbiale pendant la décennie 1930 dans les bistros voisins de la sortie des usines et dans le pays du Marquis de Sade et du Petit Père Combes.
Elle fut inventée par Alain Saint Ogan.
- Ah ! je connais, aurait pu s'exclamer une de mes tantes. C'est l'auteur de ZIG ET PUCE, une histoire illustrée que j'aimais bien lire quand j'étais jeune fille. ALFRED c'était le pingouin des deux globe-trotters.
Elle les avait bien connus sur une des pages du DIMANCHE ILLUSTRÉ le supplément dominical du grand quotidien EXCELSIOR.
Alain Saint Ogan fut le vrai créateur, dès 1925, de la vraie bande dessinée française, renonçant aux doublons qui étaient habituels dans les premières séries où l'image et le texte apparaissaient parfois complémentaires mais souvent répétitifs l'un l'autre, comme cela se vérifie dans le commencement des PIEDS NICKELÉS. Les effets graphiques obtenus dans ZIG ET PUCE incitèrent même le belge Hergé-Tintin, alors débutant en 1931, à solliciter les conseils du français chez qui les vignettes muettes humoristiques alternent avec le parler inscrit dans des bulles.
Extrait du Dimanche Illustré de janvier 1928, n° 256
- T'as le bonjour d'Alfred !
La réflexion quelque peu moqueuse n'empêcha pas la figurine de l'oiseau manchot de devenir la mascotte convoitée par les créateurs de BD dès 1976, et désignant lequel des concurrents mérite le Prix annuel d'Angoulême.
Prix annuel d'Angoulême fondé par les fanas et les marchands de bandes dessinées parfois confrontés à des revendications politisées. Ainsi en 2016, un mouvement féministe d'inspiration gauchiste exigea une représentation d'auteur(es) égale au nombre de représentants masculins. cela en dépit du fait historique que la quantité de créateurs de BD reste manifestement supérieure à celle de nos amies créatrices encore jalouses de ce qu'un zizi sur roulettes se porte mieux qu'une foufounette en guise de luge sur une pente caillouteuse.
Doc Jivaro
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17/02/2021
Ce jour
Affaires familiales
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30/07/2020
Tarzanides n° 441
Cousins d'Amérique
Après quelque détour par L'Italie, donc avec retard les séries américaines BD réussirent leur retour en France : Mai 68 ayant affaibli le recours à la censure. Des titres nouveaux pour nous, donc dédaignés par nos éditeurs traditionnels circonscrits dans l'imagerie pour l'enfance, commencèrent d'être publiés en direction d'une clientèle adulte. Il y eut PEANUTS, il y eut LIL'ABNER, ANDY CAPP … Parmi d'autres il y eut aussi POGO sous la forme d'un mensuel dont le numéro 1 édité en avril 1969.
1969 est l'année pendant laquelle votre serviteur travailla salarié pour les PTT du Boulevard Vaugirard, PTT dont il s'échappa sur un coup de tête salvateur.
Si ma mémoire ne me trompe pas, neuf numéros publiés. Il faut signaler qu'à son numéro 7 ce même POGO se modifia en POCO, probablement après une protestation émise par les ayants droit du titre américain. La Rédaction de ce mensuel du 7 rue des Filles du Calvaire (Paris 3e) dépendait de Claude Moliterni alors bien connu des abonnés de la Revue PHENIX spécialisée dans l'historique de la BD.
Les vilains pas-beaux machos s'amuseront de l'image ci-dessous dessinée par Will Eisner, dont ma scolarité montluçonnaise n'entrevit guère qu'un seul personnage féminin dont l'identité semblait fluctuante : Panthère Blonde ou Sheena ? Une Tarzanide, poignard en main que le curé et l'instituteur se chargèrent vite d'interdire de spectacle devant le double pucelage de mes yeux mineurs.
POGO
Image, page 59 du n° 1
Doc Jivaro
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21/07/2020
Tarzanides n° 440
"Lorsqu'avec ses enfants vêtus de peaux de bête" ...
On se souvient plus ou moins bien du poème rédigé par Hugo le Victor et rappelant l'un des mythes fondateurs des sociétés humaines. Ici, Caïn tuant Abel, deux frères jumeaux l'un s’attardant auprès des moutons pendant que l'autre s'émancipe pour une ère nouvelle celle des forgerons. Le bâton du berger va céder la place à l'arme du guerrier.
Le poème de 1859, changé en peinture d'art par Fernand Cormon en 1880, donna naissance à nombre de thèmes dits "préhistoriques" dans la littérature mais aussi dans quelques uns des premiers films muets. Ceux qui ne connaissent TARZAN que par la silhouette qui lui est attribuée dans la bande dessinée, ignorent que l'homme singe pour le cinéma à ses débuts ressemblait quelque peu à un grand gaillard plus souvent abrité dans une caverne que sautant de branches en branches dans une forêt. Tenez, regardez le dans son premier aspect cinématographique.
On est alors en 1918 et c'est Elmo Lincoln qui tient le rôle. Aucun pagne en peau de léopard mais une toison évoquant un ours plutôt qu'un félin. Ce n'est qu'avec l'acteur suivant nommé Frank Merril que la fourrure devient tâchée, mouchetée à la ressemblance d'un carnassier. Toutefois, en France, en 1937 et dans un petit fascicule de 16 pages, le Roi de la Jungle perd son identité. Il s'appelle TANTOR. C'est ça : le nom de l'éléphant devient le nom de l'homme.
TARZAN n'est en rien l'individu sauvage et solitaire que nous présente sans cesse la bande dessinée. Il est en réalité un gentleman de haute famille : Lord Greystoke, propriétaire d'une importante plantation en Afrique colonisée et, à ce titre comme au moment de sa naissance il est un sujet de la Reine Victoria et combattra vaillamment pour que prospère le Commonwealth of Nations.
Un Commonwealth of Nations auquel le théoricien Karl Marx lui-même rendit hommage en choisissant la terre d'Angleterre comme lieu de sa sépulture.
Doc Jivaro
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